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Le Grill a aimé avec réserves

Kong : Skull Island

La planète du singe :

Si King Kong de 1933 était une sorte d’adaptation pour les nuls du livre le monde perdu, on peut dire que le film de 2017 est une adaptation pour les kongs du film de 33.

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Les noms de certains personnages (Marlow, Conrad) font référence au cœur des ténèbres, le roman à l’origine d’Apocalypse Now. Leur écriture lui fait par contre un peu honte. Il y a aussi des plans avec un soleil rouge crépusculaire en fond, beaucoup trop en fait. (PS : l’affiche officielle est immonde).

Censé se passer dans le même univers que le perfectible Godzilla de Gareth Edward de 2013, on dirait que Kong a été entièrement créé comme une réponse aux critiques d’alors. Godzilla était trop sombre, manquait d’action et d’humour ? Kong est coloré au possible, regorge de scènes de batailles dans un rythme frôlant l’hystérie et accumule les personnages clichés pour la plupart des mauvaises copies de ceux d’Apocalypse Now, source d’inspiration revendiquée du film, sauf pour John C. Reilly en Robinson Crusoé samurai qui cabotine comme un malade. Pour le reste, John Goodman fait du John Goodman et Samuel L. Jackson du Samuel L. Jackson (sans un seul motherfucker, ce qui est notable). Tom Hiddleston par contre manque un peu d’épaisseur pour incarner un Schwarzenegger-like, son air pince-sans-rire le rend au choix malicieux ou semble crier en permanence « mais qu’est-ce que je fous dans ce film ».

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Ici c’est le singe qui descend de l’homme, par douzaines.

Pourquoi l’action se déroule à la fin de la guerre du Vietnam ? Aucune idée, d’autant plus que ce n’est pas pratique pour relier ça à l’action contemporaine du Godzilla. « Parce que ça fait joli ? » me paraît ici une réponse acceptable. Non, le scénario n’a pas d’explication pour tout, les deus ex machina sont aussi nombreux que les faux raccords.

Que ce soit la musique américaine qui passe dans les fumeries d’opium, les incohérences à foison ou les trouvailles toujours plus scabreuses pour dézinguer notre équipe d’action men, Kong, malgré ses cinq scénaristes, ne dépasse jamais le stade d’accident industriel. Pourtant, je lui ai trouvé cinq qualités indiscutables :

    • Le film propose une variante du King Kong original en ne s’attardant que sur sa première partie, celle se déroulant dans la bien nommée Skull Island. Point de grimpette sur l’empire state mais deux heures de délire esthétique dans la jungle la plus dangereuse du monde pour tous les figurants. Au moins c’est dépaysant et l’équipe artistique s’en est donné à cœur joie sur les grosses bestioles.
  • Le film se moque pas mal des codes des blockbusters, par exemple. Prometheus en prend encore plein les dents quand un personnage hurle à un autre de ne pas courir tout droit pour échapper à la chute d’un objet massif. Ce n’est pas pour ça que le film n’est pas perclu de clichés mais au moins il en a conscience.
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    Il y a bien un début de sous-intrigue avec les photos de Brie Larson mais non, même la symbolique du King Kong mâle dominant kidnappeur de jeune femme lui a été enlevé. Le film a viré un peu du machisme de l’oeuvre originale… sans faire exprès.
  • Skull Island a une approche très Game of Thrones de qui doit survivre, beaucoup de morts sont inattendues et la 3D donne la saisissante impression de faire un tour dans une centrifugeuse placée dans un abattoir.
  • Pensé comme un divertissement avant tout, les séquences d’actions s’enchaînent avec une imagination débordante. Juste l’échelon au-dessus d’un Independance Day Resurgence niveau écriture, on ne se sent presque pas coupable de rester.
  • King Kong de 1933 était le film préféré d’Hitler, Kong : Skull Island ne sera le film préféré de personne, l’histoire l’en remercie.

Kong Cinématogrill film godzillaC’est dommage car le King Kong original, grand film d’aventure doublé d’un exploit technique pour l’époque, et le Godzilla de 1954, métaphore du trauma causé par l’arme nucléaire, sont deux monuments de cinéma que l’on ringardise au possible avec ce nouvel univers inspiré des nanars japonais qui ont repris le lézard géant et ses copains Kaiju. Je suis pas contre le projet, mais je suis contre son exécution même si Kong est un poil plus agréable à regarder que le reste.

Kong : Skull Island

  • Est
  • N'est pas
  • Une chef d'oeuvre artistique, monté comme un Mad Max, profond comme un Tarkovski, maitrisé comme un Kubrick
  • Le blockbuster sans âme qui n'hésite pas à souiller une franchise pour quelques billets
  • Une relecture pertinente du film de 33 pour en faire sortir une brillante réflexion sur la part d’animalité de l'homme
  • Écris en deux semaines, c'est le genre d'oeuvre qui a été portée une vie entière
  • Un grand film d'aventure dans la jungle, de la lignée d'Apocalypse Now ou d'Aguirre
  • Un choc, une communion parfaite texte-image
  • Un miracle qu'un film de divertissement délivre un message aussi fort
  • Le film qui va me faire perdre espoir dans les univers étendu, quelle claque !
ça passe mais qu'est ce que c'est Kong / 20