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Festival de CannesLes déceptions du grill

Chronic

Au travers du vide

Film visionné à l’occasion du 68ème festival de Cannes : Le 10ème jour. Le film sort le 21 octobre 2015.

Si j’attendais autant Chronic, c’était bien pour Michel Franco. Le cinéaste mexicain  que l’on compare souvent au grand Michael Haneke, est l’un des artisans d’un cinéma coup de poing qui vous coupe le souffle, vous touche au plus profond de vos tripes et vous dérange encore longtemps après son visionnage. Après avoir traité de l’inceste forcé dans le milieu de l’industrie pornographique mexicaine (Daniel Y Ana) et du harcèlement moral dans le milieu scolaire (Despues de Lucia), il s’attaque cette fois-ci au thème de la fin de vie d’une manière assez dérangeante.

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Le film raconte l’histoire de David, un infirmer spécialisé dans l’accompagnement des patients mourants. Paumé dans sa vie personnelle, il effectue son travail avec une rigueur et une application de tous les instants au point de nouer une relation très intime et étrange avec eux.

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Ceci donne l’occasion à son réalisateur, durant une trentaine de longs plans fixes (de trois à quatre minutes chacun) quasiment dénuées de dialogues, tel des vignettes, de montrer de manière frontale le quotidien de son protagoniste et de ses contacts avec ses patients. Euthanasie, lavement, SIDA, handicap, enterrement et AVC sont au programme. Sauf que contrairement à “Amour” ou à “Quelques heures de printemps”, Michel Franco n’y insuffle aucune vie. Les scènes sont tellement minimalistes, vides et manquent cruellement de tension dramatique, à tel point que l’on se demande où est passé le cinéaste aux hors champs dérangeants et aux séquences dévastatrices. Malheureusement, l’ennui et la dépression ne seront que ce que trouvera le spectateur tout au long de l’heure et demie du film, conclu par l’une des fins les plus atroces et brutales de l’histoire du cinéma, et que l’industrie mondiale continue à dupliquer avec un plaisir monstre (n’est-ce pas mon cher Gus Van Sant).

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Le seul moment où l’on voit plus d’un personnage sourire se conclut par une note inquiétante. Ah, Michel, tu ne changeras donc jamais!

Pour autant, je ne peux nier que le film a certaines qualités. Déjà, le scénario, ou pour être plus précis, l’idée de départ est vraiment bonne. Le développement de la trame est ponctué de quelques bonnes idées ce qui, parfois, amène le film à la frontière du thriller, et qui est sujet à de multiples interprétations et débats. C’est ce qui a incontestablement séduit le jury des frères Cohen et qui lui a permis d’obtenir le prix du scénario au dernier festival de Cannes. Enfin,Tim Roth, tour à tour inquiétant et touchant, est très crédible dans le rôle, à la limite de l’absurde, de cet infirmer addict au deuil; on sent que ce projet lui tenait à cœur et qu’il s’y est investi à fond (il est aussi producteur du film).

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Mais malheureusement, Michel Franco a respecté trop scrupuleusement le cahier des charges des lauréats cannois de la décennie 90 ( rythme lent + ambiance plombante + drame exigeant) et son “Chronic” est à classer parmis les films d’auteur élitiste. Il ne fera frémir que le festivalier nostalgique des grands moments de la présidence de Gilles Jacob ( avant 2005) et les journalistes des cahiers du cinéma. Dommage.

Chronic

  • Est
  • N'est pas
  • Doté d’une idée de départ et de quelques idées de scénarios intéressants
  • Divertissant ni destiné à un public de masse
  • Composé de plans fixes assez longs et vides, ce qui a été pour notre ami Alcide et je le cite « l’exemple type de ce qu’est la négation du cinéma » et il n’a pas tout à fait tort
  • Un film qui vous apportera joie et gaité
  • Porté par la très bonne performance de Tim Roth
  • Le meilleur film de Michel franco ou du moins celui qui vous fera vous intéresser à sa filmographie
  • Un film pour le festivalier habitué aux grandes heures de l’ère Gilles Jacob et aux afficionados des cahiers du cinéma
  • Le film coup de poing sur la fin de vie tant attendu
Cliché du film cannois ennuyeux / 20