Amour, Création Artistique, Pâte à Modeler, Depardieu et Balade sauvage
La journée de votre serviteur commence à 11h30, récupération de mi- festival oblige, avant d’accélérer le rythme dans la dernière ligne droite avec « Loving » de l’americain Jeff Nichols. Tiré d’une histoire vraie, Richard Loving, un ouvrier blanc et Mildred, une jeune femme noire, décident de se marier. Sauf que dans l’État de Virginie de la fin des années 50, leur relation est interdite par la loi. Entre exils et peines de prison, Ils vont se battre environ une dizaine d’années pour faire valoir leur droit à s’aimer librement. Boosté par son influence spielbergienne, le jeune réalisateur américain nous livre un très beau film même si sa mise en scène et son traitement sobre sont, parfois, pollués par quelques tics académiques comme sa musique quelquefois trop omniprésente. Les deux acteurs Ruth Negga et Joël Edgerton sont d’une justesse folle dans leur rôle respectif. Malgré son accueil très chaleureux sur la croisette il aura du mal à distancer Toni Erdmann, Ma Loute et Mademoiselle dans la course à la récompense suprême mais je le vois bien parmi les favoris des prochains oscars.
Quatre heures et demie plus tard, j’admire la facilité qu’à Jim Jarmusch pour transformer le quotidien monotone d’un chauffeur de bus en poème filmique sur la liberté de création. Le film s’appelle « Paterson » exactement comme le nom de son protagoniste et de la ville où se passe l’action. On l’aura compris, la thématique du double y est évoquée. Il est bourré d’humour et de personnages fantasques, à l’image de celui de la petite amie interprétée par Golshifteh Farahani. Adam Driver quant à lui est très crédible dans le rôle-titre. Le film divise sur la croisette, certains le trouvent simple et plutôt répétitif, au bord du somnifère, mais moi j’ai été vraiment captivé par l’ambiance et la mise en scène du réalisateur de Broken Flowers. J’espère qu’il aura un prix.
Ensuite, la quinzaine des réalisateurs a sélectionné un magnifique moyen métrage d’animation en pâte à modeler franco-suisse: « Ma vie de courgette » de Claude Barras. On suit le quotidien d’un jeune garçon venant de perdre sa mère et qui va intégrer un orphelinat. Plutôt déprimant dit comme ça mais le magnifique scénario signé Céline Sciamma traite de ces thématiques extrêmement dures avec justesse et humour, sans tomber dans le misérabilisme. Vous en sortirez avec le sourire aux lèvres et une petite larme sur la joue.
Toujours en parlant de la quinzaine, un an après son voyage dans la vallée de la mort, notre Gérard Depardieu national s’offre, accompagné d’un rappeur en cavale, Un « Tour de France» sous la caméra de Rachid Djaïdani. Road movie sur fond de comédie sociale, il aborde certains thèmes d’actualité avec humour et impertinence tel l’islam ou l’intégration. L’interprète de Cyrano s’amuse comme un petit fou dans ce rôle d’un ancien entrepreneur conservateur, les autres acteurs font tout aussi bien. Dommage, que malgré certains moments de grâce, la mise en scène s’avère un peu brouillonne et le scénario bourré de raccourcis. Pour autant, ces défauts n’empêchent pas l’ensemble d’être assez sympathique à regarder.
Pour finir, je continue mon exploration du programme de la quinzaine des réalisateurs avec « Mean Dreams » du canadien Nathan Morlando. Pour faire simple, un jeune garçon de 15 ans vole un sac rempli d’argent et s’enfuit avec sa petite amie, tandis que le père de celle-ci, sheriff corrompu, les poursuit. Pas la claque que nous avait annoncé le patron de la sélection Édouard Waintrop mais une bonne série B tendue et bien mise en scène qui nous tient en haleine de bout en bout. Bill Paxton y compose un excellent méchant à la fois calme et froid, que demander de plus ?
Ce fut une grosse journée avec cinq films visionnés en l’espace de 13 heures. Encore une belle pépite dénichée et un deuxième film en compétition qui m’a enthousiasmé, je vous donne rendez-vous demain pour de nouveaux films.