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Le Grill a aimé avec réserves

Ghost in the Shell

Coquille vide

Si vous ne deviez voir qu’un seul film avec une héroïne forte et une réflexion poussée sur la valeur du libre arbitre… Allez voir Grave.

Pour ceux que ça intéresse, on a d’abord un manga puis une adaptation en film d’animation en 1995 par Mamoru Oshii puis en série d’animation, encore un film, des OAV, des jeux vidéo, des magnets pour frigo, etc. Très fortement inspiré du roman Neuromancien de William Gibson, pape du cyberpunk, le film d’animation Ghost in the Shell a fortement impacté les esprits en étant un des premiers gros succès de l’animation japonaise en occident (avec Akira et Evangelion grosso modo) avec des thèmes s’adressant avant tout à un public adulte féru de science-fiction : une femme cyborg, le major, étant allée particulièrement loin dans le transhumanisme au point de douter de son humanité est confrontée à une intelligence artificielle si perfectionnée qu’elle en est venue à développer sa propre identité.

L’impact fut gigantesque et les trouvailles visuelles aussi nombreuses qu’immédiatement ingérées par toute une génération de créateurs, à commencer par les Wachowski qui achetèrent les droits du film pour Matrix tellement les emprunts (les lignes de 0 et de 1 verts, l’agent Smith en IA qui s’émancipe) sont nombreux.

Voilà, ça c’est tout ce que vous ne trouverez pas dans le film de 2017.

GHOST IN THE SHELLLe film transpose quasiment à l’identique le film de 1995, certains se sont amusés à mettre les images côte à côte comme pour l’intro par exemple.

Ghost in the shell de Rupert Sanders, le réalisateur de Blanche Neige et le Chasseur, me fait penser à un coquillage exotique. Coloré, plutôt joli à regarder mais quand tu le rapproches de ta tête, t’entends la mer et pas grand-chose d’autres. C’est dommage car le matériau d’origine a un sacré sous-texte complètement aspiré par les canons hollywoodiens pour laisser un ersatz de robocop féminin entourés d’hologrammes. Plein d’hologrammes.

Le parti pris, et à ce stade de non-discrétion on peut parler de parti pris, est de tourner en live certaines scènes iconiques des films de Mamoru Oshii, quasiment au plan près, en les liant entre elles par un nouveau scénario beaucoup moins ambitieux réduisant comme une peau de chagrin l’âme de la saga à des simples rappels esthétiques. On est rapidement partagé entre de la gêne de voir la même chose en plus cher mais en moins bien et l’embarras de regarder les alter ego des personnages de l’œuvre originale pas vraiment comprendre ce qu’ils sont en train de faire vu que ces passages ne servent plus l’histoire pour laquelle ils ont été créées. Vous voulez voir le vrai film Ghost in the Shell ? Regardez Avalon de Mamoru Oshii. Ici ce n’est qu’un film de super-héros avec Scarlett Johansson.

Rila Fukushima plays Geisha in Ghost in the Shell from Paramount Pictures and DreamWorks Pictures in theaters March 31, 2017.

Après Her, Under the Skin et éventuellement Lucy, Scarlett Johanson en cyborg ayant égaré son humanité au cours de sa mécanisation est un choix plus qu’intéressant. 

Ceci posé, on va reconnaitre quelques qualités au produit bien formaté qui nous est servi : esthétiquement des efforts sont faits, les hologrammes nombreux et la mégalopole utopique présentée a son charme, plus lisse et proprette que la cité asiatique fourmillante de l’original mais son charme quand même permettant des plans pas mal en 3D. Ensuite quelques idées parsèment le film, comme le fait de le faire commencer de nuit et de montrer le jour se lever en parallèle de la quête d’identité de son héroïne ou la réécriture du personnage de Batou, le flippant mais très sympa second couteau Pilou Asbæk, afin de ne pas directement le présenter dans son look robotique. Oui il y a bien aussi une ou deux répliques qui reviennent sur la décision ou non de s’éloigner de l’humanité par des améliorations technologique, l’immense Takeshi Kitano livré avec punchline incluse et un format d’1h47 permettant de sortir de la salle avant la fermeture du Mcdo…

Ghost in the shell cinématogrill film batou

Dès le manga, Ghost in the Shell présentait une cité multiculturelle où toutes les nationalités se côtoient. Pour ce film, je trouve les accusations de white whashing injustes, d’autant plus que l’on se sert intelligemment de “l’américanisation” du Major. Sinon la section 9 est, comme dans les films d’animation, absente du récit.

Niveau tares, Juliette « j’ai refusé Jurassic Park » Binoche à côté de son rôle de scientifique maternelle est à deux doigts d’une Cotillard dans Batman 3, le remix des thèmes originaux donne envie de mordre dans une poutre, le technothriller pique ses rebondissements à une aventure du club des cinq et les antagonistes ont probablement une scène coupée où ils jettent des bébés dans un incinérateur avec « méchant » en néon clignotant écrit dessus des fois que ça ne serait pas assez évident.

GHOST IN THE SHELL

Battle Royale, Outrage, Zatoichi, l’acteur-réalisateur-scénariste Takeshi Kitano est évidemment là pour appâter le public nippon même s’il se réveille que dans la dernière partie du film.

Trop lisse, trop simplifié, Ghost in the Shell est le produit d’une certaine mentalité hollywoodienne affamée de remake, d’adaptation et de reboot persuadée que le spectateur moyen est incapable de piger les thèmes des œuvres originales. Le film n’essaye à aucun moment d’égaler ses ainés, on se retrouve avec un objet dont on ne sait pas trop quoi faire, un film pop-corn plutôt insipide si ce n’est pour les éléments, esthétiques en grande partie, ayant survécu tant bien que mal à ce formatage. Sans être un accident industriel à la dragon ball evolution, Ghost in the shell a au moins l’avantage de faire découvrir cette œuvre à une nouvelle génération mais pour ceux qui connaissaient cette œuvre novatrice d’il y a 30 ans, quelle tristesse de voir débarquer un film aux airs de déjà-vu qui semble arriver après une bataille remportée ces derniers temps par des Westworld, les quatre films d’animation sur la jeunesse du major ou Deus Ex.

Et ne me lancez pas sur le reboot de Matrix.

 

Ghost in the Shell

  • Est
  • N'est pas
  • Un technothriller honnête
  • Un bon ajout à l’univers de la saga
  • Doté d’un casting qui a du bon et du moins bon
  • Original et innovant, même si les blockbusters cyberpunks sont rares
  • Aguicheur visuellement, si on n’est pas sujet à l’épilepsie
  • Le scénario de l’année, créature de Frankenstein de passages des films d’animation en live relié tant bien que mal par une trame médiocre
  • Pas long, pas trop ennuyeux, pas compliqué…
  • Le pire film de Scarlett Johanson ou un Lucy-bis
Par des fans, pour des novices / 20