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Le Grill a aimé avec réserves

Jersey Affairs

Presque très bon…

 

Jersey affair est le premier film de Michael Pearce qu’il inscrit plutôt honorablement dans le thriller britannique contemporain : à cheval sur plusieurs thèmes avec la volonté de proposer une approche différente de ce type d’histoire,  un peu comme les premiers Ben Wheatley dont il reprend le compositeur fétiche Jim Williams (qui a aussi fait cette merveille pour Grave).

Le titre original « Beast » est bien plus à propos que « liaison amoureuse à Jersey », le film rejoint le malheureux club pas si fermé que ça des titres anglais qui ont un autre titre anglais pour la sortie française…

En clair, Molie (Jessie Buckley, carrière à suivre) est la 2nde fille préférée – sur deux, malheureusement – d’une mère conservatrice sèche comme un bout de bois mort, au bord de l’implosion elle rencontre Pascal (Johnny Flynn, dans Sils Maria et premier rôle de la série Lovesick), sombre taiseux vivant en ermite. La naissance de leur relation va aussi être le récit de l’émancipation de son héroïne, de sa famille délétère et du milieu ultra-coincés et un poil raciste des exilés fiscaux  de l’île de Jersey. Seule ombre au tableau, un tueur de jeune fille rode et Pascal l’asocial, jamais bien loin de son fusil ou de sa hache, n’est pas le dernier sur la liste des suspects. Ce postulat posé, le film prend un malin plaisir à montrer une belle histoire d’amour du point de vue de madame en la teintant d’une certaine ambivalence, la question « et si c’était lui le tueur ?» pesant sur toutes les scènes, y compris les plus légères.

Le point de départ de l’intrigue est inspiré par la « Bête de Jersey », un tueur jamais identifié qui a sévi sur l’île pendant dix ans dans les années 1960.

Moralement trouble, l’évolution de la psychologie de son héroïne à la performance solide prend la forme du désamorçage minutieux d’une bombe à retardement. La sensation de l’imminence que tout va péter à un moment ou à un autre fonctionne et on se prend à être frustré que le film n’assume pas plus son ambiance délétère, presque cauchemardesque dans des moments proches du conte noir. Au final, le récit sort ses gros sabots au point d’en devenir oubliable, le soufflé se dégonfle là où il aurait dû nous en mettre plein la vue. Un peu à la manière de Wind River, on est happé par les premiers instants pour peu à peu se détacher de ce qui nous est montré. Dommage, on en sort avec la sensation d’être passé à trois pages de scénario maladroitement amenées d’un truc vraiment bien.