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Les déceptions du grill

Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur

Le seul avantage, c’est qu’une fois séché on peut s’en servir de frisbee.

 

Offrir à la geste Arthurienne une saga épique en deux ou trois trilogies percluses de titres avec des chapitres 1 & 2, révélation et autre 3D est le rêve de Warner depuis quelques années. Guy Ritchie hérite du bébé avec un cahier des charges comprenant probablement texto de faire du seigneur des anneaux mais avec autant de prostituées et de messieurs musclés que dans Game of Thrones (dont il récupère deux acteurs) tout en piochant allègrement dans une esthétique nippone ni originale parce que le marché chinois peut toujours aider à rentabiliser le bousin. Après tout ça a marché pour Warcraft, oui on en est là.
Que le réalisateur de Snatch et Sherlock Holmes ait réussi à faire un film de ces impératifs aux gueules de titres de catégories sur le site nanarland tout en y laissant sa patte est un petit miracle, à ce compte-là on ne peut pas lui reprocher de n’avoir pu en faire quelque chose de vraiment bien. Il est cinéaste, pas urgentiste.

Le medieval fantasy est un genre très punitif, la moindre erreur de ton est assez fatale et c’est pas la version du roi Arthur de 2004 ou le Lancelot de 1995 qui me contrediront. 

Ainsi dans le Londres du Veme siècle, pardon Londinium plutôt vu qu’on a un petit souci de respect de la réalité historique, le mage noir Mordrek envoie son armée d’éléphants titanesques sur la tour noire géante de Camelot, qui fait aussi phare. Bataille épique, magie, trahison, effets spéciaux, le méchant très méchant (Jude Law qui passe d’un Watson original à un mage noir d’une copie nord-coréenne des années 80 d’un Disney destinée à être vendu sur les aires d’autoroute) tue sa femme, sa belle-sœur et Arthur dans une scène que l’on reverra six fois en flash-back, mais épargne leur fils car au fond il a un cœur. Arthur donc, va vivre de combines avec ses potes du pub jusqu’à ce qu’il soit en âge d’être joué par Charlie Hunnam pour aller sauver le pays et tenter de se taper l’apprentie de Merlin (Astrid Bergès-Frisbey qui a joué dans l’aussi méconnu que sympathique I Origins tout en portant le fardeau de son rôle de Sirena dans pirate des caraïbes 4).

Londres, 5 éme siècle après Jésus Christ.

La nature bifide, jamais unifiée en deux heures de métrage, se dévoile alors passé l’intro clinquante. D’un côté Arthur et ses chevaliers roublards sont à 100% des personnages de Guy Ritchie tandis que sur l’autre moitié on accumule les bastons sur fond vert manquant sérieusement d’âme. Le récit est haché, saturé d’ellipses, réussissant l’exploit de paraître trop condensé mais parfaitement prévisible puisque ne dépassant jamais l’enfilade de péripéties déjà vue sur une structure classique vue et revue. Pas grand-chose à se mettre sous la dent avec cet ersatz de Dark Fantasy où Ritchie s’autoparodie en se limitant à ses gimmicks de réalisation : montage alterné, côté film de casse et rythme bien speed avec de gros ralentis pour faire joli.

Jusque-là on a une série B ce qui se fait de plus banal, reprenant les canons du genre sans même penser les dépasser et se déroulant plus ou moins sans encombre. D’ailleurs j’écris ses lignes en me demandant si je ne deviens pas un vieux grincheux ne prenant son vieux que sur des vieux drames hongrois vu que Callahan a plutôt bien aimé ce film popcorn. Reste l’univers qui m’a carrément déplu.

Beckham fait un caméo plutôt bien intégré puisque le film prend souvent des airs de pu pour parfum. L’affiche a eu un accueil assez froid sur internet, au point que le film a été repoussé d’un an pour atténuer le bad buzz (été 2016 à 2017).

Comme une mode récente de tout mondialiser pour que le blockbuster devienne le mètre étalon du politiquement correct, l’équipe de héros n’échappe pas à l’effet bus magique : un personnage principal caucasien brun, un asiatique karatéka qui tiens une école d’arts martiaux, un costaud noir, un métisse qui sert à rien, une fille qui aime les animaux et fait de la cuisine magie en faisant bouillir des carottes avec des herbes, un pote gros… En soi rien de problématique si ce n’est qu’aucun n’est travaillé au-delà du cliché qu’il incarne et que ce genre de groupe se voit dans la plupart des gros budgets depuis maintenant quelques années. Ici on peut penser que ces choix sont un écho au Londres très cosmopolite d’aujourd’hui mais dans les faits on se retrouve avec une bande au look quelque part dans les limbes séparant des punks à chiens d’un clip de Gunter parti combattre des Ninja. Les amateurs de fourrure seront aux anges, le reste se dira que d’un point de vue historique, Sacré Graal c’était pas si mal.

Récemment converti à Jude Law par The Young Pope, je ne peux que me désoler de le voir englué dans un rôle de méchant avec une grimace sadique collector.

Au final Arthur est une adaptation audacieuse aux choix discutables (esthétique, scénaristiques) par leur manque de profondeur, avec d’un côté des séquences de dialogues bien speed façon sous-Snatch et de l’autre des bastons insipides manquant sérieusement d’excaliburne que pour passionner le spectateur.

Vu le four en salle qu’il se prend, pas démérité, la suite est compromise. Tant mieux, laissons Guy faire du Ritchie sur d’autres projets et remettons cette saga d’un épisode soulagement tapis d’où il n’aurait pas dû sortir.

Jude Law disant adieu aux 175 millions de budget et à l’avenir de la saga, métaphoriquement.

Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur

  • Est
  • N'est pas
  • Une tentative de modernisation du mythe d'Arthur
  • Proche de la légende originale, ça aurait pu s'appeler Robin des Bois sans trop de problèmes
  • Un blockbuster qui ne manque pas de séquences où ça tatane
  • Original, les emprunts se sentent autant que l'absence de prise de risque
  • Doté d'un casting de gens pas mauvais qui font ce qu'ils peuvent avec ce qui leur est imposé
  • Un succès en salle, ça semble compromis pour la suite
  • Dans le style de Richie pour les dialogues et les magouilles de nos héros, soit une moitié de film
  • Intéressant
Énième blockbuster sans âme / 20