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Le Grill a aimé avec réserves

Un jour dans la vie de Billy Lynn

Je vais dire beaucoup de bien d’un film que j’ai trouvé pas terrible.

 

C’est tiré d’un bouquin sorti en 2012, juste à la fin du conflit Irakien pour répondre à une actualité brulante. Cinq ans plus tard « Un jour dans la vie de Billy Lynn » arrive – comme il peut (16 salles seulement) – sur nos écrans. Problème de timing ? De rythme plutôt.

Billy Lynn Cinématogrill  sortie filmJ’ai eu l’impression de voir trois grandes croix dans la scène où ils sont derrière l’écran géant, ça aurait été le deuxième meilleur film où un soldat est comparé à Jésus sorti récemment.

Billy, tout juste 19 ans, profite de son quart d’heure de gloire. Déployé en Irak, une escarmouche ayant coûté la vie à son sergent instructeur/guide spirituel a été filmée et son action est devenu un phénomène YouTube, puis un phénomène tout court. De retour au pays, son régiment de traumatisés part en tournée. Les USA veulent exhiber les héros de la nation même si le moindre BANG de feu d’artifice les renvoie en enfer.

Billy Lynn Cinématogrill affiche film

Billy, don’t be a hero, don’t be a fool with your life…

Tourné en 4K 3D et 120 images par seconde, le film se veut une petite révolution technologique, mais c’est pas la technique qui compte, c’est la façon dont on s’en sert. Tout baigne dans un rendu surréaliste aux couleurs trop vides, aux mouvements trop fluides, parfait pour illustrer l’état d’esprit des soldats noyés dans l’univers artificiel d’un spectacle de mi-temps. On observe comme à travers les parois d’un aquarium leurs « exploits » mortifères devenir prétexte à un show des Destiny Child. Un choix de nom pas anodin face à la réflexion sur le karma parcourant le film ; oui on en est à ce niveau d’interprétation. L’acteur principal, Joe Alwynn, colle à merveille à Billy qui a constamment l’impression de ne pas être à sa place. Ang Lee, dans la lignée de l’odyssée de Pi, développe des thèmes universels : comment aimer son prochain et trouver sa place dans un monde que l’on ne comprend pas, à travers l’horreur absolue de la guerre et l’horreur, plus commune et plus insidieuse, du consumérisme mêlé d’instrumentalisation politique. Une dissonance, un entre-deux toxique sur lequel tout le potentiel du récit va se nicher.

Garrett Hedlund;Chris Tucker;Joe Alwyn

Chris Tucker en agent tentant de vendre l’histoire de la troupe à Hollywood prend une autre dimension quand il compare l’histoire de Billy à un scénario de film, une amorce intéréssante de quelque chose pas assez poussé.

Contrairement à l’épopée de Richard Parker, la beauté d’une nature numérique est remplacée par un stade de béton aux allures d’hôpital où les symboles troquent une exotique universalité pour des références 100% ricaines : drapeaux, armes, hot-dog, coca, rien ne manque et par exemple l’histoire se place à thanksgiving, fêtant les indiens qui ont sauvé les premiers colons, pour permettre de placer un sous-texte sur les américains venant sauver l’Irak côté sous-sols.

Sorte de récit initiatique tordu, le film marque par la justesse de son propos quelque part entre la mémoire de nos pères et l’échelle de Jacob. Aux USA le public n’a pas aimé que le plus américain des cinéastes taïwanais livre une critique acerbe du Texas très Trump, à l’envers des standards puisque l’on est devant le premier film avec des pom pom girls bigotes, des footballers américains pour une fois plus idiots qu’idoles et la violence ordinaire d’un Texas où le rêve américain est allé se faire un cinquième pontage coronarien à cause de son régime pétrole et dinde farcie.

Billy Lynn Cinématogrill ang lee

Trop bleue, trop nette, la guerre aux allures de carte postale est une réussite du fond et de la forme pour les cinq minutes qu’elle occupe dans le film.

Si on lui pardonne vite son sergent instructeur empreint de philosophie new-age joué par un Vin Diesel pas mauvais mais trop peu de temps à l’écran que pour faire oublier qu’il est Vin Diesel et d’une Kristen Stewart quasi-anecdotique décidément accro à ce genre de projets atypiques, quelques passages moins fins que d’autres viennent ternir le propos. Le principal problème demeurant toutefois qu’en deux heures d’une action quasiment en temps réel, Ang Lee réussit parfaitement à retranscrire l’état d’esprit d’un mec qui s’ennuie ferme en attendant que ça passe.

Billy Lynn Cinématogrill film critique

“Bon Billy, je fait à la vitesse normale le Poatrax, les Bouboules et la Boubouche.”

 

Un jour dans la vie de Billy Lynn

  • Est
  • N'est pas
  • Un récit épais dans ses choix narratifs
  • Une invitation au voyage comme l’Odyssée de Pi
  • Un format vidéo innovant pour mieux capter le quotidien afin de servir le propos
  • Pour ceux qui cherchent un film de guerre avec Vin Diesel
  • Dur, on est (volontairement) mal à l’aise face à cet univers trop artificiel
  • Passé à côté de son sujet : le choc post-traumatique
  • Traversé par des acteurs et des scènes marquantes par les thèmes abordés, directement ou non
  • Sans quelques gros problèmes de rythme, principalement à cause du manque d’enjeux
C'est très bien mais je ne sais pas si je conseille / 20