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Festival de CannesLes déceptions du grill

Album de Famille

Étrange conception

Album de famille est un curieux film turc. Pourtant, sur le papier, pas grand-chose de particulier ne ressortait de cette histoire de couple stérile qui cherche à cacher à leur entourage l’adoption de leur fils en montant de toutes pièces un faux album de famille, ou alors, juste un léger sentiment qu’on n’aura pas affaire à un drame social larmoyant. Pour confirmation, on en est très loin.

Le premier long métrage de Mehmet Can Mertoğlu est une comédie dramatique qui possède un dispositif assez particulier. Si la première partie aligne métaphores et séquences absurdes qui donnent l’impression de se retrouver face à du Quentin Dupieux sous xanax, la seconde se compose d’un enchaînement de petites vignettes d’un immobilisme ennuyeux où même les acteurs restent aussi figés que des statues. À vrai dire, j’ai même cru, entre deux battements de cils, que le projectionniste s’était endormi sur le bouton pause puis j’ai vu les sous-titres défiler et cela ne m’a pas du tout rassuré.

Soyons clairs, Album de Famille ne m’a pas séduit. Mais, je ne reproche pas au jeune réalisateur turc d’avoir tenté une approche originale, bien au contraire, sa capacité à construire une narration cohérente avec des séquences avares en dialogue et son refus de faire des champs contre champs forcent le respect. Je regrette juste qu’il ait fait  primer la forme qui frôle le délire opaque d’un cinéaste égocentré sur son propos aussi intéressant qu’acerbe sur la Turquie d’Erdoğan. Un constat qui limitera la postérité du film à son prix acquis à la Semaine de la Critique l’année dernière ainsi qu’à trois rediffusions nocturnes sur Arte, programmées entre la captation d’un concert de Vincent Delerm au Trianon et un spectacle de danse contemporaine mis en scène par une obscure troupe allemande. À moins qu’il ne réussisse un joli coup d’éclat avec son deuxième long métrage, chose que je lui souhaite.