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Le Grill a aimé avec réserves

Au poste !

La cage aux Oizo

Ah Dupieux. Quand Mr. Oizo laissa un instant l’électro de côté pour se mettre au cinéma avec Steak en 2007, on n’a pas compris ce qui nous arrivait dans la face : une réalité fantasmée, un humour absurde sans concession fait d’un timing ultra-maîtrisé et de non-sens soignés, une fascination pour le ciné avec des citations de Grease à Orange mécanique, Eric et Ramzy à contre emploi (ce qui a perdu une partie du public) et des tas de petits rôles occupés par des copains (Kavinsky ou SebastiAn). Onze ans après et cinq films plus tard, Au poste ! a pourtant comme un parfum de première fois, de son introduction champêtre à son final au quatorzième degré, Orelsan dans un rôle anecdotique (avec un figurant connu et un cri bien trouvé aussi) et Grégoire Ludig pas exactement dans son registre habituel. D’ailleurs soyez prévenus, l’humour du Palmashow est quasi absent.

La bande-annonce annonce vraiment la couleur, sinon les décors, des immeubles aux courbes futuristes, donnent un cachet assez unique au film.

Soyez rassuré aussi – ou non – Au poste c’est du Quentin Dupieux pur jus. Presque un peu trop même, son “anormalité” n’est plus aussi surprenante pour qui connaît bien sa filmo, seuls les novices risqueront de s’en prendre plein les dents. Et encore, moins que dans ses bizarreries initiales, Steak ou Rubber restant plus foisonnant. Ici on est dans la lignée de Wrong ou Réalité (un homme cherche son chien, un homme cherche le cri parfait) : on a une idée farfelue que l’on développe avec des à-côtés, ça fonctionne mais s’en est presque trop simple. S’ajoute quand même un élément de taille, Au poste est une parodie, quasiment une réponse, aux grands films policiers français des années 80 et plus particulièrement à Garde à vue de Claude Miller (qui est tout simplement une pierre angulaire du cinéma hexagonal). Même unité de lieux et de temps (une soirée dans un commissariat), mêmes personnages (le témoin aussi suspect numéro 1, l’inspecteur et l’adjoint pas dégourdi) et même procédé narratif, le suspect raconte ce qu’il a vu et l’inspecteur relève les contradictions pour tenter de faire surgir la vérité. Sauf que évidemment… tout n’a ni queue ni tête ! Et c’est surtout une occasion pour ce superbe théoricien qu’est Dupieux de déconstruire et triturer tous les éléments qui composent un récit à priori connu du spectateur : l’adjoint simplet est ici stratosphériquement inutile, les comportements irrationnels du témoin passent le mur du con, Poelvoorde s’éclate en flic un brin hargneux un brin cinglé, les flash-back illustrant un témoignage pas forcément fiable semblent échapper à ceux qui les racontent, etc. Sans aller aussi loin que dans Réalité, les niveaux de trames narratives se superposent, l’aspect “théâtre filmé” est exploité à fond et comme souvent, la fin tombe direct, sans boucler toutes les intrigues et surtout pas la principale.

Quentin Dupieux n’a plus fait de musique originale depuis Wrong Cop, et c’est un de mes grands regrets.

Alors c’est pour qui ? Les adeptes du culte Dupieux qui seront en joie de le retrouver après 4 ans d’absence, un bonbon acidulé d’1h13 à peine en espérant que Le Daim, projet tourné en parallèle avec un Dujardin narcissique, viendra pimenter un style qui commence à devenir un peu trop apprivoisé. Par contre ceux qui espèrent découvrir une bonne comédie estivale… Comment dire, essayez au moins une fois mais malgré son vernis absurde et burlesque, Au poste ! demeure le rejeton d’un cinéma qui réfléchit sur le Cinéma, qui cherche à secouer et à proposer un regard neuf sur ce qui fait un film, ici un policier français, entre la parodie à la OSS et l’absurde façon Les nuls. Bref, Au poste ! c’est aussi con que c’est pas con. C’est clair ?

Au poste !

  • Est
  • N'est pas
  • Le nouveau Quentin Dupieux !
  • Long, 1h13 et c'est tout
  • Inspiré par Garde à vue, le chef d'oeuvre de Miller
  • Aussi perché que Rubber et Steak, ses premières créations
  • Une comédie absurde menée par un duo génial
  • Dingue pour sa musique
  • Une petite pépite pour Cinéphiles
  • Le Dupieux le plus renversant
Moité génial, moitié poussif / 20